"L'ascenseur continuait à monter avec une extrême lenteur."
Ce roman m'a mis une telle claque que j'ai beaucoup de difficulté à écrire à son sujet. Je ne le maîtrise pas. Je me suis découvert une nouvelle idole, Murakami, que je lirai et relirai pendant des années. Mais je ne comprend pas ce qu'il m'a fait, ni comment. Je tiens à ma volonté d'écrire sur chaque livre lu. Je vais donc écrire sur La fin des temps, sans grande confiance sur le résultat.
Sentir monter une envie d'écrire, puis découvrir un génie. Un roman si beau, si profond, si structuré qu'il écrase toute mes ambitions. Le chemin qu'il me reste à parcourir est tellement gigantesque que je n'arrive pas à l'appréhender. Est-ce vraiment utile? Pourquoi vouloir écrire après tout?
"Je m'allongerai sur la pelouse et je regardais le ciel. Puis je boirai de la bière fraîche à satiété. Avant que le monde prenne fin." p472
Ces dernier temps, le sexe m'a plus occupé que l'écriture. Murakami aurait approuvé. Son héros, après avoir lutté contre son destin durant des centaines de pages, coincé entre deux organisations tentaculaires et manipulé par un scientifique fou, après avoir appris que son esprit allait se désintégrer, qu'il ne lui restait plus que quelques heures de conscience, ce héros choisit de passer une nuit tendre avec une femme qu'il a rencontré la veille, dans une bibliothèque. Et Murakami choisit de prendre le temps de décrire cette nuit.
"J'aime bien cette heure sombre avant le lever du jour, dit-elle, sûrement parce que c'est un moment propre mais inutilisable." p586
Murakami est un poète. J'ai lu ce roman beaucoup plus lentement que la plupart des autres, car presque sur chaque page j'ai lu une phrase magique qui m'a lancé dans une contemplation, de mon plafond, du paysage à travers une fenêtre de RER, du vide.
"Allongé sur le lit, je la regardais vaguement du coin de l’œil, appuyé sur un coude. Sa manière d'entourer son corps de ses vêtements, un à un, était empreinte d'un calme silencieux, soyeux comme un oiseau d'hiver, sans mouvement inutile." p160
Ne vous méprenez pas, le roman n'est pas réellement centré sur le femmes ou sur l'amour. Un appartement est détruit en 15 minutes, des créatures des ténèbres kidnappent des employés du métro, des licornes meurent au cours de l'hiver. Ce roman est très riche, mais je ne le maîtrise pas. J'aurais donc plus écrit sur moi que sur le livre. Je le relirais.
Alors, baiser ou écrire? J'ai encore beaucoup de questions à régler, mais contrairement au héros de Murakami, ma volonté reste intacte. Je vais devoir déterminer tout ce qui me freine, tout ce que je vais devoir abandonner.
Je peux aussi choisir de boire des bières au bord du canal, de fumer des joints après l'amour en caressant sa peau. Là est tout le problème : choisir.
"Je refermai le livre et, tout en m'envoyant au fond du gosier le peu de Jack Daniels qui restait, je réfléchis un moment à ce monde encerclé de murailles. Je pouvais me représenter relativement facilement la forme de ces murailles et de la porte. Des murs très hauts, et une porte immense. Et puis un silence de mort. Et moi au milieu de tout ça. Mais ma conscience était très vague, et je ne pouvais pas voir le paysage qui m'entourait. Je discernais dans tous les détails le paysage d'une ville, mais ce qui était autour de moi étais terriblement vague et brumeux. Et, de l'autre côté de ce voile opaque, quelqu'un m'appelait." p237
La fin des temps, Haruki Murakami, 1985, Point
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